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X93

by Behel Boson

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1.
Le verger 05:31
Nous reviendrons peut-être, le terme manifeste, fouler le grand théâtre du jour de nos quinze ans. Avant de disparaître, avant de gagner l’est, revoir la nuit s’abattre sur la plaine qui s’étend au bout d’un bras de terre, la neige et les jusants se confondre en couleurs. Nous reviendrons sans peine, l’allure automatique, les réflexes inaltérés du pas des vétérans, enlacer les grands chênes, les orantes chimiques, les branches maculées de fruits phosphorescents, les oranges amères, les baies, les mangoustans, la brume et son odeur. Nous reviendrons peut-être, pour la paix, pour le geste. Certains de ne trouver, virage après virage, qu’abîmes et kilomètres. Avant de gagner l’est, nous reverrons l’été prodiguer ses orages. Nous reverrons nos mères, le verger d’anciens temps. Nous verrons les lueurs.
2.
Sous ta peau 04:48
Haut des dunes. A sans cesse aiguiser tes canines, en peine d'adolescence. Comme les gens des magazines, tu freines et tu relances. A brûler des deux bouts la mèche à paraffine, limpide, en apparence. Campari. Codéine. Qu'importe la distance. Des mois, des années à fomenter l'indélébile, grisé de promesses avinées, à te réinventer une île loin des carcans salis. Criblé d'impacts en cicatrices, tu joues la scène au ralenti. Tu n'as jamais laissé d'indice. Les jours de mauvais sang, quand l’ennui se manifeste, zoom arrière, champ-contrechamp, tu comptes le temps qui reste, dénudé dans la glace sans ta barbe et sans ton chapeau. Tu peux sourire. Mais rien n’efface qui se cache sous ta peau. C’est l'arcane aussi haut et, parmi les oiseaux, en bas de l'échelle aussi, qui se cache sous ta peau ? Raidi sous les drapeaux, le verbe en calicot... Si t’es jamais vraiment parti, qui se cache sous ta peau ?
3.
Ce serait un lendemain de fête, mâtiné de brume et d’alcool blanc. Une fin d’été. Dans l’aube timide et incomplète, à l’incertitude du jour suivant, je serais prêt. A l’ombre effacée d’une fenêtre, un vieil homme au regard différent apparaîtrait. Il me ferait signe de la tête, m’indiquerait la voie du levant. Il serait temps. Négligemment, je fuirais l’amiral pour une carte postale d’un horizon clément. Pour un moment, je serais l’animal, la veine et le pétale : le premier élément. Seraient-ce les heures qui se répètent ? Loin de l’incendie qui se répand, je passerais pour un vieil homme et quarante allumettes. Un autre visage. Un autre sang. Il serait temps. Négligemment, je fuirais l’amiral pour une carte postale d’un horizon clément. Pour un moment, je serais l’animal, la veine et le pétale. Le premier élément.
4.
Ne dis rien, assieds-toi. Tes cheveux ont blanchi ? Tu as gardé les yeux du père. Du moins, j’ai ce souvenir. J’ai ce souvenir, des nuits d’amour, et la chaleur d’être tous là, avant de n’être personne, de n’être personne, entre ces murs que rien n’oblige à s’affaisser. N’être personne, l’éclat qui déconne à la lumière noire. Vas-y, regarde-moi. Ton visage a changé… Ici, tu sais, c’était l’hiver. Du moins, j’ai ce souvenir. C’est vrai, je devrais sortir. Mais, au dehors, les grilles se fondent sur le gris. Tu sais, je ne suis plus personne. Je ne suis plus personne, pas même une ombre qu’on attend sur le pallier. Je ne suis plus personne, l’éclat qui déconne à la lumière noire. Les années passent comme ça, à faire semblant. On ne peut pas regretter ce qu’on n’a jamais connu. Et la mémoire c’est comme tout, ça passe, ça se décolore. Les mots deviennent flous, les histoires se raccourcissent, on résume le précis, il n’en reste plus grand chose. Les nuits suivent les matins, les matins succèdent aux nuits, on prend un café, quelques fruits, on sourit mécaniquement aux ombres blanches qui se tiennent sur le seuil. Et puis c’est pas vrai, il m’arrive de sortir encore. Les allées du jardin qui s’étirent comme autant de veines en circuit fermé, ici un vol d’étourneaux à la cime du vieux chêne, là-bas le cri atroce d’un vélomoteur trafiqué. Je comprends plus vraiment ce qui m’entoure. Est-ce que quelqu’un pourrait allumer les phares, qu’on puisse compter les toiles, se faire une idée de ce qui reste ? Est-ce qu’il y a quelqu’un ? Est-ce qu’il n’y a personne ? Moi, je ne suis personne. Avant de t’en aller, puisque l’heure a tourné, rejoue-moi les larmes sur l’acrotère… Et laisse moi un souvenir, juste un souvenir. Le rire d’un gosse, un jour de fête en bord de mer, et l’illusion d’être aimé comme personne. Sans fleurs ni couronnes. Le bruit de l’eau contre ces voix qui me rappellent que je ne suis personne, ni moi ni personne, à la lumière noire.
5.
Piscine 03:40
Bleu divan. Fauve ou persan, tu t’étires au soleil, couchée sur le chant en attendant l’appel. Evidemment, il t’a dit qu’il reviendrait seul, sur le ciment, aux ombres qui défilent à l’écueil. Contretemps. C’était avant tes doutes et tes saccages. Et lui, pourtant, n’a pas voulu la fin du voyage. Pourquoi ? Ces larmes cachées derrière le voile quand te revient le goût du métal, brutal. N’attends pas, par les mers dessous, l’âme effilée dans la faille, un dernier rendez-vous aux travées du carnaval. Tu es à genoux. N’attends pas qu’il t’écrive à la boue des symboles en diagonale, sans cris, sans remous, sur le tableau final. Tu es à genoux.
6.
Almanach 04:03
Et j’étais tout à la fois le grand phénix et l’engelure entre tes mains, un étai sur la paroi, un sacrifice, une blessure, un fils de rien. Seul, au sommet de la falaise. 
(18/01/93) Et j’étais la fantaisie, l’ombre d’un roi dans l’équinoxe entre tes seins, une idée de l’apraxie qui ronge l’âme des faux colosses par trop humains : une immobile chimiosynthèse. 
(18/04/93) Et j’étais cet inconnu à l’intention de la relève partie trop loin ; pétrifié et retenu des jours trop longs, des nuits trop brèves, contre tes poings, comme un glacier dans la fournaise. 
(18/07/93) Et j’étais ce disparu que tu espères, au clair de lune, à la morte eau, à jamais irrésolu et fendant l’air, entre les dunes, à ton écho. Où sont les cendres ? Où sont les braises ? 
(18/11/93)
7.
Il était question de reforger l’histoire, d’aborder de front l’amont du territoire. Au premier mot. D’un retour sur nos pas, de trouver l’écho, la clameur initiale. Car il était question d’un retour en rafales, de rebâtir les ponts, les grandes cathédrales. Contre la peau, des ciments madécasses : chavirer à l’eau, regagner la surface. Ne te retourne pas ! C’est la rue qui se cisaille. Des fantômes autour de toi qui peinent à l’autorail. Des feux rouges aux tabacs, ce que tu crois défile, mais cette ville n’existe pas : c’est un mirage immobile. Comme il était question de rétablir les torts, d’aliéner nos noms, de feindre le trémor… Rien de nouveau. D’autres, avant, d’autres corps, rêvaient au halo d’une ville à l’aurore.
8.
Dans mes yeux noirs, l’éclat dépassé de la mémoire d’un voyageur égaré. Je suis l’écart aux pas retracés de part en part. Je suis venu, sans signal et sans raison, je n’ai jamais reçu votre invitation. Je vais sans visage. Je n’ai pas de nom. Je suis l’enfant des mortes saisons, un insecte posé là, sur le plafond. Je saurai trouver l’abri, la contusion, la toucher et vous étreindre sans un son. Je suis l’enfant des mortes saisons. Dans l’entonnoir de vos vies passées, comme un miroir aux reflets entrelacés, j’ai cet espoir de vous traverser de part en part. Je suis venu sans tambour et sans clairon, dans l’éclair opaque d’une révélation. Vous n’avez pas d’autre choix que l’abandon. Je suis l’enfant des mortes saisons. C’est la marque intime des premiers hauts-fonds. Je suis larmes. J’ai la saveur du poison. Je suis femme. Je suis l’étrange garçon. Je suis l’enfant des mortes saisons. Dans vos murs et dans le clos de vos maisons, dans vos échappées ou dans vos collisions, ubiquiste sur le sol de vos prisons, je suis l’enfant des mortes saisons. Rangez vos épées, vos dagues, vos canons. Je n’ai pas d’armée, non, pas de garnison ; je me nourris de ce qui vous est profond. Je suis l’enfant des mortes saisons. C’est ma flamme qui vous fera pharaon, sur mes lèvres ou dans le creux de mes sillons. Je suis l’homme et je suis l’humble papillon. Je suis l’enfant des mortes saisons. Je suis venu, sans signal et sans raison, je n’ai jamais reçu votre invitation. Je vais sans visage. Je n’ai pas de nom. Je suis l’enfant des mortes saisons.
9.
Rue Blanche 03:34
C’est une place pavée de grès, entre la gare et la rue Blanche, près du cimetière. Sur un banc pâle et griffonné, elle restait là de longs dimanches à fixer les pierres. Dans la nuit qui n’en finit pas, cette ville est un cinéma. Figurante aux yeux sombres, au parfum de datura. C’est la mémoire qui m’abandonne quand j’attends près de l’interphone. Au hasard d’un mois de juillet, j’ai pu la suivre le long des quais de la rue Blanche, contre l’étoffe, à louvoyer dans la moiteur d’un mois d’été. Et puis l’avalanche. Quatre semaines entre ses murs sans rien se dire, aux flammèches qui se déhanchent, pour un souvenir pris dans un bain d’halogénures. Et dans la rue Blanche… Dans la nuit qui n’en finit pas, cette ville est un cinéma. Figurante aux yeux sombres, au parfum de datura. C’est la mémoire qui m’abandonne quand j’attends près de l’interphone.
10.
La nuit 05:24
Je suis rentré dans un soupir, avec ma gueule encore morose. Tes grands yeux qui s’attendent au pire, sèche les un peu, ce n’est pas grand chose. C’est une ancre, comme à l’habitude, plantée sur mes plus beaux hauts-fonds : sous mes airs dénués d’inquiétude, je cherche encore la solution. Tu sais, je retrouve pas mon idéal. J’y peux rien, je me sens seul sur Terre. Ni la perspective d’un naufrage, ni le frisson d’un grand voyage, rien ne perturbe la rivière. Comment lutter contre la nuit, d’une nuit presque infinie, dont la rumeur s’étend dehors ? Ça ira mieux si je m’endors. Ferme les yeux. Serre-moi fort. Une fois encore, je ne sais pas le dire, tu m’en voudras de moins en moins. Je me remettrai à sourire, tu comprendras que ce n’est rien qu’une encre noire sur des souvenirs, des souvenirs qui le vaudront bien. Mais tu sais, je retrouve pas mon idéal. J’y peux rien, je me sens seul sur Terre. Ni le fait de prendre de l’âge, ni la valse des personnages. Non, rien, jamais ne me libère, si ce n’est toi. Lorsque sans bruit et dans la nuit presque infinie, que tu me serres contre ton corps. Ça ira mieux si on s’endort. Ferme les yeux. Serre-moi fort. Serre-moi fort.

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released April 28, 2017

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